État des lieux de la santé en France : Ayons l’audace de parler des véritables problèmes !

Article paru dans Atlantico

 

Au cours du seul mois de décembre, trente personnes sont décédées seules sur un brancard aux urgences sans avoir pu être examinées. Les hôpitaux de paris (APHP) ont perdu 10% de leurs effectifs d’infirmières en quatre ans. Début janvier, la moitié des cabinets de médecine libérale étaient en grève…Sans parler des délais de prise de rendez vous qui ne cessent de s’allonger.

Factuellement et sans parti pris idéologique, le système de santé Français ne fonctionne plus.

Le ministre de la santé François Braun parlait en Juillet d’un « système à bout de souffle » en faisant l’état des lieux de la santé en France…Force est de constater que six mois plus tard, c’est pire ! Il ne parvient pas à réformer et il ne le pourra pas tant que les véritables problèmes ne seront pas évoqués.

La crise sanitaire du covid a mis en évidence une sous performance de notre système de soins comparativement à celui des pays qui nous entourent tels que les Pays-Bas ou l’Allemagne.

Le réflexe Français classique lorsqu’un problème apparait consiste à considérer qu’il provient d’un sous financement. Un indicateur fiable permet de faire des comparaisons internationales, c’est la dépense courante de santé au sens international (DCSI). Avec une dépense de 11,3% du PIB en 2018 et 12,4% du PIB en 2020, la France fait parti des pays de l’UE qui dépensent le plus pour la santé. La santé n’est pas sous financée dans notre pays.

Le constat est impitoyable : À dépense équivalente, nous n’avons pas un service rendu à la population au niveau de celui des pays qui nous entourent. Une remise à niveau s’impose.

Cette remise à niveau est rendue encore plus indispensable par le vieillissement de la population qui augmentera inéluctablement les besoins de prise en charge dans les années à venir. Les personnels de santé étant mobiles, la compétition pour les attirer et les retenir sera de plus en plus féroce. L’attractivité de notre pays pour les professions médicales doit être améliorée pour éviter de graves pénuries de soins, indignes d’un pays développé, dans un avenir proche.

Une remise à niveau réussie implique l’humilité et le pragmatisme nécéssaire pour s’inspirer de ce qui fonctionne dans les pays qui nous sont comparables. Elle implique aussi de sortir de la culture centralisatrice Française qui abouti à une administration pléthorique qui paralyse le système, prend des décisions parfois hors sol et épuise les personnels en tâches administratives.

Le découragement des personnels provient d’une part de rémunérations insuffisantes, songez qu’en partant en Suisse, un infirmier Français se verra proposer un salaire trois fois plus élevé…Mais le salaire n’est pas la raison prioritaire évoquée par ceux qui démissionnent. Les raisons évoquées par les démissionnaires concernent essentiellement les conditions de travail, jugées déplorables en France, les tâches administratives qui peuvent constituer 70% du temps de travail d’un infirmier (au détriment des soins prodigués) et le poids étouffant de la bureaucratie.

Chercher à faire des économie en rationnant les compresses revient à se mentir en occultant l’essentiel : La taille disproportionnée de la bureaucratie.

34% des emplois hospitaliers Français sont des emplois administratifs alors qu’en Allemagne, ce chiffre est de 24% !

La pénurie de personnel soignant provient directement de cette mauvaise allocations des moyens que les Français consacrent à la santé. Pour augmenter le service rendu, il est indispensable de ramener nos dépenses administratives dans la norme européenne, ce qui va dans le sens de la construction et de l’harmonisation européenne. Moins de dépenses administratives, c’est plus de moyens pour embaucher des personnels soignants qui rendent directement service aux malades, ce sont de meilleures conditions de travail et de meilleures rémunérations.

L’exemple hollandais pourrait être une source d’inspiration pour notre pays. Le gouvernement néerlandais a constaté humblement que le fonctionnement d’un système de santé est trop complexe pour être géré par une administration centrale d’une part et d’autre part qu’être à la fois assureur, payeur, fournisseur de soins et gestionnaire en situation de quasi monopole n’améliore pas la qualité du service rendu.

La formule adoptée par nos amis hollandais ainsi que par tous les pays qui nous sont comparables en termes de dépenses de santé mais qui obtiennent de biens meilleurs résultats tant en ce qui concerne le service rendu aux malades qu’en ce qui concerne la satisfaction des personnels est un modèle de concurrence régulée des établissements de soins publics et privés, de concurrence tarifaire mais aussi de libre choix des citoyens entre différentes caisses d’assurances maladies…Ce qui signifie la fin de la situation de monopole de la sécurité sociale et une responsabilisation des usagers susceptible d’éliminer les incitations biaisées.

Le monopole de la sécurité sociale « à la Française » est un choix idéologique qu’aucun des pays performants en matière de santé n’a fait. La liberté de choix des caisses d’assurances maladie ne signifie pas la fin de la solidarité…Dans aucun des pays qui nous entourent la concurrence régulée n’a fait disparaitre la solidarité ou exclu des usagers. Le risque santé étant en partie indépendant des personnes, la solidarité entre les citoyens est une nécessité mais ce risque étant aussi en partie dépendant de leur comportement, une responsabilisation est nécéssaire. 

La concurrence régulée permet cette responsabilisation individuelle, la préservation de la qualité des soins, la réduction des couts ainsi que de libérer des marges pour favoriser la prévention des maladies.

Réussir en France ces réformes indispensables que nos voisins sont parvenus à mettre en place nécessitera du courage et de l’audace…Le courage de s’attaquer à l’emprise bureaucratique.